5 cas où une enseigne croit être protégée avec sa marque

Déposer sa marque, voire son logo, à l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI) ne suffit pas à les protéger complètement.

Voici 5 cas où l’enseigne doit réfléchir à sa stratégie de différenciation sur son marché concernant son bien immatériel le plus précieux : sa marque.

Par Vanessa Bouchara, avocate et spécialiste en propriété intellectuelle, fondatrice du cabinet Bouchara, membre du Collège des Experts de la Fédération Française de la Franchise.

 

        1. Ma marque est descriptive, déposée à l’INPI, donc personne ne peut l’utiliser.

        FAUX

Une marque est descriptive lorsqu’elle identifie, à travers un signe ou une dénomination, la caractéristique d’un produit ou service, comme sa qualité, sa quantité, sa provenance géographique, ou encore sa « désignation nécessaire, générique ou usuelle » (code de la propriété intellectuelle). Exemple : « Chocolat noir » ou « Vin rouge bordelais ».

Pendant longtemps, l’INPI n’a pas réellement réalisé d’examen de la distinctivité des marques, d’où la présence persistante de marques descriptives des produits et/ou services sur les registres de marques.

Or, tant l’INPI qu’un Tribunal pourraient annuler une marque pour défaut de distinctivité si une action en nullité était engagée contre celle-ci.

En effet, une marque sert à distinguer les produits et services d’une entreprise de ceux de ses concurrents. À défaut, elle ne remplit pas son rôle de marque et ne peut pas être appropriée par un seul acteur du marché. Par exemple : « Apple » (Pomme), marque utilisée dans le secteur informatique distinctive pour les produits et services associés, ne serait pas distinctive pour des fruits et légumes.

À noter que l’INPI, aujourd’hui très strict dans l’appréciation de la distinctivité des marques, refuse fréquemment d’enregistrer des marques que l’office considère comme ne remplissant pas cette condition.

 

       2. J’ai déposé mon logo, il m’appartient.

       FAUX

Un logo peut, sous réserve d’originalité, être protégé par le droit d’auteur.

S’il a été créé par un tiers, il est indispensable de s’en faire céder les droits afin de le déposer et de l’exploiter. À défaut, ce tiers pourrait tenter de vous interdire l’usage et le dépôt du logo qu’il aura lui-même créé.

Par vigilance, il convient de toujours se faire céder les droits sur toute création réalisée par des tiers pour le compte de sa société.

Autres cas : Le concept architectural d’un magasin (aménagement intérieur, voire extérieur) réalisé par un prestaire externe doit faire l’objet d’une cession de droits.

De la même manière, un mannequin ou un comédien pour une vidéo ou photo de promotion devra également céder ses droits, notamment sur son image.

 

          3. J’ai déposé ma marque, elle est enregistrée, je peux donc l’utiliser sans risque.

          FAUX

Le dépôt d’une marque est publié par les offices pour que les tiers, éventuellement titulaires de droits antérieurs, en soient informés et puissent engager les actions nécessaires à la défense de leurs droits.

Seuls les titulaires ayant mis en place une surveillance effective de leurs marques seront informés de dépôts portant atteinte à leurs droits et pourront former opposition dans les délais.

Lorsqu’aucune opposition n’a été formée, la marque est alors enregistrée.

Cela ne veut cependant pas dire que les titulaires de droits antérieurs ne peuvent plus agir, bien au contraire ! Ils le peuvent toujours et pendant une durée de cinq ans à compter de leur connaissance de l’exploitation de leur marque.

Il faut particulièrement veiller à deux phénomènes assez courants:

  • Le cybersquatting : enregistrement d’un nom de domaine identique à celui d’une marque, enseigne ou personne connue, qui peut avoir été déposé dans l’objectif de générer du trafic naturel sur Internet ou de le vendre à son titulaire originel.
  • Le typosquatting : enregistrement d’un nom de domaine légèrement différent d’un nom très connu, dans l’objectif de générer du trafic suite à une erreur de frappe ou d’orthographe tapée dans le navigateur.

 

           4. J’ai déposé ma marque dans la bonne classe, je suis protégé pour toute la classe

           FAUX

Si les marques se déposent par classe(s), il convient de parfaitement désigner les produits ou services que le déposant envisage véritablement d’exploiter.

Exemple particulièrement parlant : la classe 9 de la convention de Nice, dont l’entête, « Appareils et instruments scientifiques, de recherche, de navigation, géodésiques, photographiques, cinématographiques, audiovisuels, optiques, de pesage, de mesurage, de signalisation, de détection, d’essai, d’inspection, de secours (sauvetage) et d’enseignement; appareils et instruments pour la conduite, la distribution, la transformation, l’accumulation, le réglage ou la commande de la distribution ou de la consommation d’électricité; appareils et instruments pour l’enregistrement, la transmission, la reproduction ou le traitement de sons, d’images ou de données; supports enregistrés ou téléchargeables, logiciels, supports d’enregistrement et de stockage numériques ou analogues vierges; mécanismes pour appareils à prépaiement; caisses enregistreuses, dispositifs de calcul; ordinateurs et périphériques d’ordinateurs; combinaisons de plongée, masques de plongée, tampons d’oreilles pour la plongée, pinces nasales pour plongeurs et nageurs, gants de plongée, appareils respiratoires pour la nage subaquatique; extincteurs. » ne comprend pas tous les produits de la classe.

Ainsi, même en reprenant de manière prudente et précautionneuse tous les éléments de la classe 9, le titulaire se pensera protégé pour des lunettes, ou encore pour des coques de téléphone portables, alors que ce n’est pas le cas.

En fait, il faut agir dans l’autre sens, à savoir faire figurer au libellé de son dépôt ce qui correspond à son activité réelle. À défaut, le risque de protection inadéquate est important et lourd de conséquence pour le titulaire de droits.

 

          5. Je vends à l’étranger, mon dépôt français à l’INPI suffit.

           FAUX

Il est essentiel de disposer de marques partout, en France comme à l’étranger, où le signe est exploité.

À défaut, le titulaire de la marque française risque de se faire prendre sa marque dans d’autres territoires que celui du dépôt et de ne pas avoir le droit de commercialiser ses produits dans ce territoire.

Ce risque commercial important est indispensable à anticiper en déposant sa marque à l’étranger quand son activité n’est pas simplement locale.

Par exemple, le dépôt auprès de l’OHMI (Office des marques de l’union européenne, créé en 1994) confère une protection sur l’ensemble du territoire de l’Union Européenne. Sa durée de vie est de 10 ans et il peut se renouveler indéfiniment.

 

Vanessa Bouchara et François Simoneschi ont réalisé ensemble un ouvrage intitulé « Le droit des marques » en 2014 (non réédité).

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